Frédérick TRISTAN
 

Univers invisible

Frederick TristanMes premiers mots d'enseignant prévenaient mes étudiants que l'iconologie n'est pas l'étude des images mais des invisibles signes lovés dans le secret des images. La poésie ne s'exprime jamais que dans l'interstice des mots. Ailleurs (et si près), la science utilise des chiffres et des lentilles, ces distances, afin d'ajuster la raison et les sens au vertige sidéral. Constat : pour tenter de débusquer l'illisible réel, il n'est d'autre langage que le biais, ce trompe-l'oeil révélateur, toute flèche hardie se cassant avant d'atteindre la cible. D'où : l'invisible est de nature plus juste que le visible puisqu'il ignore l'omnipotante apparence. Ainsi la recherche se meut dans la faille, non plus dans l'harmonie supposée des sphères, mais dans l'ombre et les échos d'un univers invisible plus vaste que le visible, et nôtre cependant -- une matière autre, tapie dans et hors de la trompeuse réalité commune.

Mes encres noir sur blanc tentent de surprendre la trace de vibrations et de structures invisibles dans la dimension du visible. Ascèse et épiphanie de l'épure. La ligne somnambule découvre une forme abstraite, humble et sensible, écriture et pont entre les espaces intérieurs et stellaires. La caverne de l'être habite les grands fonds de la psyché aussi bien que les abysses universels. Témoignage du regard à sa pointe : l'en-deçà et l'au-delà de l'oeil sont l'ici. Nulle frontière de l'intellect et des sens entre un corps et l'étendue spatiale et temporelle, entre l'interne et l'externe du vivant. L'énigme de la pensée propose la véracité d'une empreinte ajoutée au mystère du Tout. En ce paradoxe la science et l'art s'accompagnent.

 
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